Les études scientifiques sur la psilocybine se multiplient depuis déjà de nombreuses années. Bien connue pour ses effets sur la perception et la conscience, cette substance psychédélique suscite un intérêt croissant dans la communauté des chercheurs pour son potentiel thérapeutique, notamment dans le domaine de la santé mentale.
Les recherches les plus récentes explorent ses applications dans le traitement de la dépression résistante, de l’anxiété ou encore du trouble de stress post-traumatique (TSPT). Autre champ d’investigation : la neuroplasticité. Plusieurs chercheurs tentent ainsi de mieux comprendre ses mécanismes d’action sur le cerveau et la configuration neuronale. Dans cet article régulièrement mis à jour, nous nous efforçons de dresser un état des lieux des études actuelles sur la psilocybine.
Nous espérons que ce panorama vous permettra d’approfondir vos connaissances sur la psilocybine, autrefois perçue uniquement comme une drogue hallucinogène, mais qui pourrait bien se transformer en un outil révolutionnaire pour la médecine moderne.
Table des matières
Une nouvelle étude sur l’utilisation de la psilocybine dans le traitement de la dépression résistante à Paris - Août 2024
C’est le GHU de Paris qui sera finalement le premier lieu en France où la psilocybine pourra être administrée à des patients atteints de dépression résistante. Baptisée COMP006, elle fait partie d’un essai clinique international initié par la firme Compass Pathways. L’objectif ? Déterminer si la psilocybine combinée à un soutien psychologique peut venir en aide à des patients dépressifs n’ayant pas répondu aux précédents traitements.
Cette étude s’inscrit dans un champ de recherche déjà bien documenté concernant les effets de la psilocybine sur les états dépressifs. En 2022, une étude publiée dans le New England Journal of Medicine avait déjà évalué l’efficacité de la psilocybine sur des patients souffrant de dépression majeure résistante aux traitements conventionnels. L’échantillon avait alors reçu une dose unique de psilocybine et avait bénéficié d’un accompagnement psychologique. Les résultats s’étaient révélés très encourageants : réduction significative des symptômes dépressifs et permanence des effets positifs sur l’humeur jusqu’à 3 mois après l’administration de la dose initiale. Elle ouvrait ainsi le champ de la recherche en révélant le potentiel de la psilocybine comme traitement alternatif chez les patients ne répondant pas aux antidépresseurs classiques.
A la suite de cette étude, un nouvel essai clinique a eu lieu en 2023 comparant la psilocybine à l’escitalopram, un antidépresseur fréquemment prescrit. Mené par l’Imperial College of London et publié dans le même journal, cet essai proposait de comparer les effets sur une période de 6 semaines : certains patients recevaient une dose quotidienne d’escitalopram tandis que les autres recevaient deux doses de psilocybine. Les résultats avaient là encore été concluants, puisque la psilocybine s’était révélée aussi efficace que l’antidépresseur classique, avec des améliorations plus rapides et une meilleure tolérance chez certains patients.
Enfin, début 2024, une autre recherche publiée cette fois-ci dans le Journal of Psychopharmacology explore l’action de la psilocybine sur le traitement des symptômes anxieux et dépressifs chez des patients atteints de cancer en phase terminale. Menée dans un cadre thérapeutique, elle consistait à administrer une dose unique de psilocybine aux patients et avait montré une réduction significative des symptômes à 6 mois.
Étude scientifique sur la psilocybine et le traitement de l’addiction à l’alcool - Mai 2024
C’est le professeur Mickael Naassila et son équipe qui ont mené cette étude à l’Inserm afin de traiter les addictions à l’alcool. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Brain et ouvrent des perspectives prometteuses. En effet, leur recherche a montré que l’administration de psilocybine réduisait de moitié la consommation d’alcool des sujets. Précisément, les chercheurs ont pu mettre en évidence le rôle du noyau accumbens (comprenez : la région cérébrale que l’on associe au plaisir et à la récompense) et sa latéralisation. Quand la psilocybine est injectée dans la partie gauche du noyau, la consommation d’alcool diminue tandis qu’elle reste stable si l’injection est faite dans le noyau droit.
Plus spécifiquement, l’équipe du Professeur Naasila a pu mettre en évidence une diminution des récepteurs de la sérotonine dans le noyau gauche (qui est impliqué dans les effets hallucinogènes) ainsi qu’une augmentation du gène BDNF impliqué dans la plasticité cérébrale dans le noyau droit. La psilocybine a également montré des effets sur le récepteur D2 de la dopamine : c’est en augmentant l’activité de ces récepteurs que la psilocybine agirait pour contrecarrer les effets de la dépendance à l’alcool…
Cette recherche tend à confirmer les premiers résultats observés dans l’étude PAD menée en 2023 par le CHU de Nîmes. Cette étude pilote menée sur 30 participants à l’hôpital du Grau du Roi, explorer elle aussi la faisabilité et l’efficacité de la psychothérapie assistée par psilocybine dans le traitement des symptômes dépressifs liés au sevrage.
Que peut-on retenir de cette recherche ? D’abord, elle confirme l’action de la psilocybine sur le cerveau humain et sa capacité à agir dans le traitement de problématiques spécifiques telles que les addictions. D’autre part, elle ouvre la voie à de nouvelles recherches sur le rôle de la latéralisation cérébrale dans les effets des psychédéliques.
De nouvelles perspectives dans le traitement de l’anorexie mentale par la psilocybine - avril 2024
C’est à l’université Monash en Australie que l’on doit cette nouvelle découverte, publiée dans la revue Nature. L’équipe s’est interrogée sur la possible action de la psilocybine dans le traitement de l’anorexie mentale, un véritable fléau qui toucherait 1,5% des femmes avec un taux de mortalité élevé. L’étude a été menée sur des rates et a pu montrer le lien entre l’amélioration de la flexibilité cognitive déjà démontrée par la psilocybine et la modification des comportements rigides associés aux troubles alimentaires.
En effet, l’étude montre que la psilocybine agit en stimulant les récepteurs de la sérotonine impliqués dans la régulation de l’humeur et la motivation. Elle pourrait ainsi permettre une nouvelle approche dans le traitement de l’anorexie en favorisant des changements d’habitudes mentales rigides. Concrètement, elle offre un espoir pour les patients souffrant de cette maladie, aujourd’hui majoritairement traitée par des antidépresseurs avec des effets très aléatoires. L’étude menée sur des animaux de laboratoire doit désormais être confirmée par des essais cliniques sur des humains.
Ces articles pourraient aussi vous intéresser
Le psilocybe : la star des champignons médicinaux anti-stress
Comment les champignons médicinaux peuvent-ils vous aider ?
Psilocybine et addiction : quels sont les risques ?
Quels sont les effets des champignons hallucinogènes sur le cerveau ?