Les retraites aux champignons sont-elles légales ?

Avec la montée en popularité des substances psychédéliques pour leurs potentiels thérapeutiques, les retraites à la psilocybine gagnent en notoriété. Mais ces retraites aux champignons sont-elles légales ? Faisons le point sur la légalité des retraites aux champignons dans différents pays, en nous concentrant sur les aspects juridiques et les règlements.

Table des matières

La légalité des champignons contenant de la psilocybine : introduction

Histoire de l’interdiction des psychédéliques

La question de la légalité est récente ! En effet, pendant des siècles, les champignons contenant de la psilocybine ont été utilisés dans des rituels spirituels et de guérison par les cultures indigènes en Amérique centrale et du Sud notamment. Cependant, au 20ème siècle, la législation internationale a durci les règlements concernant ces substances, les classant comme stupéfiants illégaux en raison de leurs effets psychoactifs. Aujourd’hui, la légalité diffère donc selon les pays.

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Le cas de la France

En France, la psilocybine est classée comme stupéfiant : sa possession, sa production et son utilisation sont donc strictement interdites. Toute forme de retraite aux champignons est par conséquent illégale, et les contrevenants s’exposent à des sanctions sévères. Néanmoins, plusieurs études cliniques sont en cours en France sur les usages thérapeutiques de la psilocybine. C’est d’ailleurs en France que cette molécule a historiquement été synthétisée pour la première fois…

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Les psychédéliques sont-ils vraiment des stupéfiants ?

La question de la légalité conduit donc à s’interroger sur la notion de stupéfiant. En effet, la Convention sur les substances psychotropes adoptée par les Nations Unies en 1971, a classé la psilocybine parmi les stupéfiants. C’est cette classification qui a conduit de nombreux pays à interdire la possession, la production et l’utilisation de psilocybine. Cependant, les psychédéliques (PDL) ne répondent pas à tous les aspects de la définition juridique des stupéfiants. Cette définition juridique n’est d’ailleurs arrivée en France qu’en 2022 : est considérée comme stupéfiant toute substance qui est à la fois dangereuse pour la santé et qui provoque une addiction. Or la psilocybine ne répond à aucune de ces deux propositions : elle n’est pas dangereuse pour la santé et ne provoque pas d’addiction.

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Retraites aux champignons légales : réglementation internationale

Retraites psychédéliques légales en Amérique Centrale et Amérique du Sud : un marché juteux​

Maria Sabina
Maria Sabina

De nombreux pays d’Amérique du Sud ont une tradition ancienne d’utilisation de champignons psychédéliques dans des contextes cérémoniels. Ceci explique une certaine tolérance face à l’utilisation de la psilocybine.

Ainsi, au Mexique, la consommation des champignons hallucinogènes est-elle légale dans certaines régions indigènes. Les retraites aux champignons peuvent donc se dérouler dans ces zones, avec un guide spirituel local. Certaines villes sont même devenues de véritables épicentres du tourisme psychédélique. C’est le cas de San Jose del Pacifico ou Huautla de Jimenez, où trône la statue de Maria Sabina, une chamane emblématique trônant sur un champignon géant. Convaincue par les bénéfices potentiels des enthéogènes, la sénatrice Alejandra Lagunes plaide pour la légalisation des champignons psychédéliques à des fins thérapeutiques dans l’ensemble du pays.

Mais c’est surtout la Jamaïque qui s’impose comme la première destination pour les retraites psychédéliques. Et pour cause : dans ce pays, les PDL ne sont pas illégaux. Le pays y a donc vu une opportunité de développer une véritable industrie de plusieurs milliards de dollars. Plusieurs complexes touristiques de l’île des Caraïbes se sont donc spécialisés dans l’organisation de séjours psychédéliques… facturés parfois plusieurs dizaines de milliers de dollars !

Vers une utilisation encadrée en Amérique du Nord

Au Canada, la législation évolue progressivement. En effet, depuis janvier 2022, le Règlement sur les aliments et drogues a été modifié. Santé Canada peut donc accorder des autorisations aux médecins qui en font la demande à des fins thérapeutiques. Le Canada se positionne ainsi comme pionnier dans la recherche sur les thérapies assistées par psychédéliques. Néanmoins, les retraites à la psilocybine restent illégales sur le territoire, en dehors de ce programme d’accès spécial.

Aux États-Unis, la psilocybine est classée depuis 1978 comme une substance de l’annexe I au niveau fédéral, ce qui rend sa possession et son utilisation illégales. Cependant, certains états et villes ont commencé à assouplir la législation suite aux récentes recherches cliniques sur la psilocybine. Par exemple, l’Oregon a adopté une mesure en 2020 pour légaliser l’utilisation de la psilocybine sous supervision professionnelle. Il est donc désormais possible dans cet état de participer à des ateliers psychédéliques sous contrôle d’un facilitateur professionnel. Les villes de Denver, puis Oakland ont quant à elles dépénalisé l’usage des truffes magiques suite à référendum en 2019.

Une shroom house aux Etats-Unis

Les Pays-Bas, le seul pays européen où la psilocybine est légale

Le Magic Mushroom Gallery à Amsterdam
Le Magic Mushroom Gallery à Amsterdam

Sur le vieux continent, seuls les Pays-Bas font figure d’exception en matière de législation sur les champignons psychédéliques. Bien qu’ayant initialement ratifié le traité des Nations Unies de 1971, le gouvernement a autorisé dès les années 2000 la possession et la consommation de truffes à la psilocybine. Plusieurs acteurs proposent donc désormais des retraites non religieuses à la psilocybine encadrées par des professionnels.

C’est donc la seule opportunité de pouvoir bénéficier d’une expérience transformatrice en Europe. En effet, si quelques cantons Suisses autorisent certains médecins spécifiquement licenciés à exploiter les psychédéliques dans un protocole très strict, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne et même l’Espagne restent très fermes. Interdiction donc de participer ou d’organiser une retraite sur ces territoires sous peine de lourdes sanctions.

Autre problème pour les francophones : même s’il est assez facile de trouver des retraites légales aux Pays-Bas, la plupart d’entre elles sont exclusivement proposées en anglais. Or, l’efficacité de l’expérience repose essentiellement sur la phase d’intégration, qui s’opère par la mise en mots du vécu. À moins d’être parfaitement bilingue, il est donc préférable de choisir l’une des rares retraites disponibles en français.

Et ailleurs dans le monde ?

Terminons cet état des lieux du statut légal de la psilocybine par un rapide tour d’horizon des pays d’Asie et d’Océanie.

Sur le continent asiatique, on ne plaisante pas avec la possession et la consommation de stupéfiants. La prohibition des drogues est très stricte notamment en Chine et en Indonésie. Consommer ou posséder des substances psychédéliques vous expose à des peines extrêmement lourdes, pouvant aller jusqu’à la prison à perpétuité voire… à la peine de mort !

En revanche, l’Australie s’intéresse de plus en plus à la recherche médicale. Les thérapies assistées par MDMA y ont déjà été autorisées, ce qui laisse espérer une ouverture progressive à l’usage de la psilocybine à visée thérapeutique.

L’Australie autorise les thérapies assistées par MDMA
L’Australie autorise les thérapies assistées par MDMA

La légalité des retraites aux champignons varie donc considérablement à travers le monde, mais la tendance reste majoritairement à l’interdiction de la psilocybine. Difficile donc de participer à une retraite champignons légale avec un produit encore classé comme stupéfiant et illégal dans de nombreux pays. Pour ceux qui cherchent à explorer les bénéfices thérapeutiques et spirituels des champignons psychédéliques, il est essentiel de choisir des retraites dans des juridictions légales et de participer à des programmes encadrés par des professionnels. En Europe, seuls les Pays-Bas offrent actuellement cette opportunité.